Retour sur l’ascension fulgurante du CBD en Thaïlande

Le CBD a un avenir certain en Thailande. Une tendance qui résulte d’une évolution nette des mentalités. En effet, encore en 2016, le pays comptait 356 000 détenus, dont environ 220 000 personnes incarcérées pour des infractions liées au cannabis et autres drogues. Une proportion qui n’a pas laissé indifférent le ministre de la Justice, le général Paiboon Koomchaya. Il fait un constat d’échec, en ce qui concerne la lutte contre la drogue. Le mois de juin de la même année, le grand général fait une déclaration en faveur des toxicomanes. Une frange de la population qui devient désormais des malades : Ils devraient bénéficier d’une aide, et non une peine de prison.
La période 2017-2020, à marquer d’une pierre blanche
En Thaïlande, l’histoire du cannabis médical CBD commence en 2017. Année où la partie du nord du pays a légalisé la culture du chanvre, variété de cannabis très pauvre en THC. Il a quand même fallu attendre mai 2018, pour que le gouvernement adopte à un projet de loi en faveur de la recherche sur les vertus thérapeutiques du cannabis CBD. Cinq mois plus tard, les médecins et autres professionnels de la santé ont été autorisés à prescrire la plante : Une grande première dans la zone Asie du Sud-Est. Vers la fin de l’année 2018, le Parlement légalise la commercialisation du chanvre médical CBD (importation, exportation et cession). La loi est validée par 166 voix et 13 absentions. Elle stipule néanmoins une commercialisation « sous le contrôle de l’État ».
2019 : Une année pour le moins mouvementée pour le CBD
L’année 2019 constitue un tournant majeur dans l’histoire du CBD en Thaïlande. En effet, dès le mois de février, la toute première centre de production de chanvre est sortie de terre. Bien entendu, ce lieu de production est sous contrôle de l’État. Le mois suivant, le parti Bhumjaithai (qui veut dire Fier d’être thaï) mène une campagne électorale fondée sur l’assouplissement des législations régissant le cannabis. Anutin Charnvirakul, leader du parti est formel :
« La marijuana a davantage de propriétés positives que négatives ».
Une conviction qui convainc le plus grand nombre, au point que le gouvernement s’est attelé à légaliser le chanvre CBD médical.
Assaut au centre Khao Kwan
Le mois d’avril 2019, la Thaïlande assiste à un événement rocambolesque avec un dénouement en faveur du CBD. En effet, le 3 du mois, les forces de l’ordre ont fait une descente au centre de recherche agricole de Suphanburi, province pas très loin de la capitale Bangkok. Quelque 205 plants de cannabis y ont été découvert : 6 personnes ont été arrêtée et placées en garde à vue. Une affaire qui a fait les choux gras de la presse thaï. Il faut dire que les médias n’ont pas été tendres avec Decha Siriphat, directeur du centre. Ils l’ont présenté comme un véritable parrain de la drogue. Sur le site web d’un journal local, on pouvait lire :
« Un chercheur est convaincu de faire plus d’argent avec de l’herbe qu’avec d’autres cultures. Il transforme son centre en usine de production de marijuana ».
Coup de théâtre : la justice thaïlandaise abandonne très vite les charges contre Decha Siriphat. Celui qui venait à peine d’être taxé d’ennemi public numéro 1 est totalement blanchi. Mieux, on lui prête l’image d’un bienfaiteur distribuant gratuitement de l’huile de cannabis, à des patients sujets au cancer, maladie de Parkinson et à autres pathologies incurables. Decha (en Thaïlande, le prénom prime sur le nom de famille) explique son action comme étant un « impératif moral ». En tout cas, elle lui a valu un remerciement de la part du ministre de la Santé.
Place à un amendement au profit du CBD

Dès la nomination d’Anutin Charnvirakul comme ministre de la Santé en juillet 2019, il a pris une décision en faveur du CBD. En effet, il a annoncé son intention d’amender la loi de 2018 sur l’utilisation du chanvre médical. L’idée est de conférer à quelque 3 000 praticiens de médecine traditionnelle l’habilité à prescrire légalement la molécule. Un mois plus tard, le ministère de la Santé met les graines et l’huile de chanvre CBD, sous la bannière « légal ». Néanmoins, la loi en question cantonne la production au seul domaine de producteurs autorisés, sur les cinq années à venir.
Vers du CBD fait-maison
Anutin ne perd visiblement pas son temps, quand il s’agit de mettre en avant le cannabis médical CBD. Mi-septembre 2019, il annonce l’intention de Bhumjaithai d’une proposition de loi allant dans ce sens. Celle-ci vise à autoriser tous les foyers thaïlandais à cultiver jusqu’à six plants de cannabis CBD. Ils pourront en faire un usage personnel, ou bien vendre les récoltes à l’État. Anutin estime que la seconde option leur rapporterait environ 12 000 thbs (environ 327 euros). Une véritable fortune si l’on compare avec les revenus moyens de la population. Le ministre prête alors au cannabis CBD, un rôle de pilier de l’économie thaï, au même titre que le riz et la canne à sucre.
Sensibilisation dès l’école élémentaire ?

Le gouvernement thaïlandais est convaincu de la nécessité de mesures d’accompagnements pour les législations régissant le cannabis CBD. Il table sur des formations à l’adresse des profesionnels du secteur, mais aussi aux foyers désireux de cultiver les plantes. Un haut-placé du ministère de l’Éducation détonne alors en août 2019, en annonçant des cours sur le cannabis dans les écoles. Toutefois, ce projet reste pour le moment en stand-by.
Pour autant, l’idée semble avoir inspiré un hôpital implanté dans la province de Prachinburi. Le mois de septembre 2019, l’établissement a effectivement proposé une formation sur la culture et l’utilisation du cannabis médical CBD. Une initiative qui lui value plus de 630 kg de plantes de la part de la Police. Seul hic : Ces cannabis confisqués à des dealers ne sont pas purs. Ils sont contaminés par des métaux lourds, des pesticides et autres polluants. L’établissement hospitalier est alors autorisé à produire ses propres cannabis médicaux.
Focus sur les fameuses « Ganja studies »
L’idée d’étudier en profondeur le cannabis médical CBD est de plus en plus populaire en Thaïlande. En effet, l’université de Rangsit veut se démarquer dans cette démarche. Banyat Saitthiti, doyen de la faculté d’innovation en agriculture, annonce les « ganja studies », une formation universitaire sur la plante. Il explique :
« Nous serons les pionniers des programmes d’éducation sur la marijuana en Thaïlande »
Il faut dire que Banyat Saitthitila parle en connaissance de cause. La faculté d’innovation en agriculture de l’université de Rangsit a effectivement ouvert, dès avril 2019, le premier institut de recherche sur le cannabis CBD du pays. Il compte actuellement une douzaine de chercheurs.
Une application pour acheter du CBD
Dr Ganja in TTM est le point d’orgue de l’essor du CBD cannabis médical en Thaïlande. Il s’agit d’une application destinée à faciliter la distribution de ce type de produit. Les concepteurs partent effectivement du constat que celui-ci est plutôt difficile d’accès. Bon nombre de malades, devaient alors se rendre dans des enclaves pour se le procurer. Cette application lancée en début 2020 permet surtout d’enregistrer les malades, lesquels ne devront plus faire la queue des heures durant auprès des centres hospitaliers.
En conclusion, le CBD a fait une ascension fulgurante sur la période de 2017-2020 en Thaïlande. Une issue logique, dans la mesure où dès août 2016, le gouvernement a déjà affiché son intention de décriminaliser le cannabis. D’ailleurs, avant la loi de 1934, les Thaïlandais pouvaient utiliser librement la plante, aussi bien à des fins médicales que récréatives. À l’heure actuelle, la page d’accueil du site officiel du ministère de la Santé présente des feuilles de cannabis médical CBD. Certains observateurs tablent sur la légalisation du cannabis récréative à l’horizon 2024. En attendant, l’usage récréatif du cannabis reste passible de 15 ans de prison, soit la même peine pour un crime de lèse-majesté.